Théodore Botrel - Fleur qui pique

Quand les ajoncs en avalanche
Tombent des grands talus dorés
Ils vous tiraillent par la manche
Pour être de vous admirés

Et l'on s'arrête et l'on se pâme
Sur le petit flocon d'or fin
Qui vous emplit le cœur et l'âme
D'un trouble indicible et sans fin

Si vous cueillez la fleur mignonne
Prenez bien garde, ô maladroit,
La fleur d'ajonc, la fleur bretonne
La fleur bretonne pique, pique les doigts

Ô vous, les coquettes baigneuses
Qui revenez avec juillet
Laissez vos odeurs capiteuses
De corylopsis et d'œillets

Embaumez-vous par la campagne
Par la plaine ou le bois profond
Toute l'odeur de la Bretagne
Tient dans un petit brin d'ajonc

En respirant la fleur mignonne
Gare aux minois trop chiffonnés
La fleur d'ajonc, la fleur bretonne
La fleur bretonne pique, pique le nez

Ainsi l'Annaïck que j'adore
Et que j'adore en sauvageon
Est une fleur qui vient d'éclore,
Un joli petit brin d'ajonc

Comme l'ajonc, elle est rustique
Ma foi, je la préfère ainsi
Et qui s'en approche s'y pique
Car elle a des griffes aussi

Je l'aime trop, la fleur mignonne
Qui ne prend garde à ma douleur
Ma fleur d'ajonc, ma fleur bretonne
Ma fleur bretonne pique, pique le cœur